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Le biomédical hospitalier face aux enjeux RSE 


Rédigé par Aurélie Pasquelin le Lundi 17 Novembre 2025 à 19:47 | Lu 55 fois


Lancé en 2023 au sein de l’AFIB, le groupe de travail RSE explore des thématiques aussi variées que la réparabilité des dispositifs médicaux, la consommation énergétique des équipements d’imagerie, ou encore l’arbitrage entre usage unique et réutilisable. Le point avec Antoine Galmiche, ingénieur biomédical et pilote du groupe. 



Comment s’organise le groupe de travail RSE au sein de l’AFIB ?  

Antoine Galmiche : Le groupe de travail RSE de l’AFIB a vu le jour en 2023, avec une première réunion la même année. Rapidement, nous avons structuré nos réflexions autour de trois sous-groupes thématiques qui existent toujours. Le premier s’est consacré à la réparabilité des dispositifs médicaux, avec pour ambition de créer un indice de réparabilité spécifique au secteur biomédical. Mais ce chantier s’est heurté à une réalité complexe : la diversité des équipements dans les hôpitaux rend difficile la standardisation de fiches types. Ce sous-groupe est donc actuellement en veille. Une collaboration avec des associations comme Halte à l’obsolescence programmée (HOP) a été envisagée, mais reste à concrétiser.   

Et les deux autres sous-groupes ?   

Le deuxième s’intéresse aux équipements d’imagerie, en particulier à leur consommation énergétique et aux leviers disponibles pour en prolonger la durée de vie. Le troisième axe de réflexion porte sur l’usage unique versus le réutilisable, notamment pour les dispositifs à consommables. L’objectif étant d’évaluer, à l’échelle hospitalière, le meilleur compromis entre performance environnementale et viabilité économique. Nos travaux, aujourd’hui presque finalisés, montrent que le réutilisable l’emporte dans la majorité des cas sur le plan écologique. Mais ce constat doit être nuancé : certains établissements ont perdu leur capacité à stériliser certains dispositifs, après avoir opté pour le tout jetable. Revenir en arrière implique souvent des réinvestissements importants en équipements et en personnel.  

Le groupe mène-t-il également des actions transversales ?

Pas pour le moment. Nous avons préféré répartir les membres dans les sous-groupes thématiques selon leurs expertises et centres d’intérêt. Cela dit, deux grandes orientations transversales commencent à émerger : prolonger la durée de vie des équipements – via la maintenance, le réemploi, voire l’achat d’occasion – et réduire leur impact environnemental, qu’il s’agisse de consommation énergétique, d’usage de l’eau ou de gaz techniques comme l’hélium en IRM. Ces leviers, bien que techniques, offrent une certaine marge de manœuvre pour intégrer la RSE dans la gestion du parc biomédical.  

Quels sont les grands enjeux à venir en imagerie médicale ?  

La question de la durée de vie des équipements, en particulier les IRM et scanners, est centrale. Aujourd’hui, le modèle économique repose sur un forfait technique amorti sur sept ans, ce qui pousse les établissements à renouveler leurs appareils même s’ils sont encore parfaitement opérationnels. Résultat : en France, 69 % des équipements ont moins de cinq ans, contre 46 % en moyenne en Europe. En lien avec la Société française de radiologie (SFR), nous travaillons à faire évoluer ce cadre pour permettre un amortissement sur dix ans. Selon le Shift Project, cela permettrait de réduire de 32 % l’empreinte environnementale, sans impact sur la qualité des soins. Nous plaidons aussi pour que les upgrades soient reconnus comme des remplacements à part entière, ouvrant droit à un remboursement intégral. Cela suppose également une modification réglementaire, que nous portons auprès de la DGOS et du ministère. Car aujourd’hui, les gains technologiques résident davantage dans les logiciels, notamment l’intelligence artificielle pour optimiser la consommation énergétique sans compromettre la qualité des images, que dans le matériel lui-même. Cette logique de renouvellement systématique tous les sept ans est donc de moins en moins pertinente.  

Quels freins ralentissent l’intégration de la RSE dans les services biomédicaux ?  

Ils sont nombreux. D’abord, les habitudes et les cultures d’établissement freinent parfois l’adoption de nouvelles pratiques, même si elles sont plus durables. Ensuite, chaque démarche RSE doit être adaptée au contexte local, ce qui rend difficile la généralisation. D’un point de vue technique, l’obsolescence logicielle ou les exigences croissantes en cybersécurité peuvent contraindre au remplacement de dispositifs pourtant encore fonctionnels. De même, certains fabricants peuvent cesser la maintenance au bout de sept ans, pour des raisons marketing ou de stratégie commerciale, ce qui limite les possibilités de prolongation d’usage. Enfin, tout dépend de la dynamique locale : si, en interne, une équipe est déjà engagée sur les enjeux RSE, les projets avancent plus rapidement. Sinon, la démarche passe souvent au second plan, la priorité restant la qualité des soins et la sécurité des patients.  

AFIB et The Shift Project : une alliance pour décarboner le biomédical 

Depuis plusieurs mois, le groupe RSE de l’AFIB travaille main dans la main avec le think tank The Shift Project pour objectiver l’empreinte carbone des dispositifs médicaux et identifier des leviers de réduction. Grâce au maillage des ingénieurs biomédicaux hospitaliers, cette collaboration a permis de réaliser une première estimation fiable du parc d’équipements électro-médicaux en France – une donnée jusque-là inexistante. « Sans l’AFIB, nous n’aurions jamais pu obtenir une telle estimation », souligne Baptiste Verneuil, ingénieur au Shift Project et coordinateur du rapport consacré aux dispositifs médicaux. 

Enrichi par les réflexions déjà menées au sein de l’AFIB, ce travail a alimenté les recommandations du Shift Project. Selon son rapport Décarbonons les industries des dispositifs médicaux publié en juin 2025, les équipements consommés en France sont responsables de 7,4 MtCO₂e par an, « un niveau comparable aux émissions liées à l’ensemble des industries agroalimentaires en France ». Les marges de progrès sont considérables : prolonger la durée de vie des appareils d’imagerie, privilégier le transport maritime au détriment de l’aérien, optimiser les consommations énergétiques ou encore développer le reconditionnement. Selon le rapport, la mise en œuvre simultanée de ces leviers pourrait réduire de 72 % les émissions du secteur d’ici 2050. 

> Lire le rapport complet sur le site du Shift Project.

> Article paru dans le Hors-série AFIB 2025, à lire ici






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